mercredi 18 avril 2012

France. Election présidentielle 2012. 6/11



Jean-Luc Mélenchon


Images extraites de la campagne officielle à la télévision française.



















Mon avis :

La forme. Un observateur qui ne le connaîtrait pas ne peut que trouver la campagne fort séduisante. Pour ce qui est des meetings de masse  en plein air, on imagine qu'il ne doit pas être difficile de mettre les autocars et trains nécessaires pour faire le plein d'une place. En ce qui concerne la campagne médiatique, ayons l'honnêteté de reconnaître que Mélenchon passe très bien à la télévision, que la charte graphique avec dominante rouge (fond d'écran et cravate) accroche très bien l'oeil. Sur ce plan, il n'y a rien à dire : c'est presque parfait, sauf pour ceux qui n'aiment pas le rouge !

Il y a aussi l'ambiance : une ambiance participative, avec des anonymes, des visages connus (Clémentine Autain et quelques caciques du Parti communiste), ce que Mélenchon est le seul à pratiquer à ce niveau, avec Poutou. Donc, le Front de Gauche est fort bien mis en valeur, ce qui est important dans la perspective des législatives. Et surtout, Mélenchon use énormément du "nous", là où Hollande ne connaît que le "je". Côté modernité, aucune référence à un quelconque site Internet.

Le fond. C'est là que j'aurai le plus de réserve à l'égard de Mélenchon : ce n'est pas un perdreau de l'année, contrairement à ce qu'il tente de faire croire. Et cette réalité-là me dérange prodigieusement.

"Je suis le bruit et la fureur !" Ouais ! Ex-plus jeune sénateur de France. Sénateur, ça veut dire "planqué", dans la mesure où l'on se fait élire en dehors de toute confrontation d'homme à homme ou à femme. Les élections sénatoriales, qui se déroulent devant un aréopage de grands électeurs, n'ont rien à voir avec les législatives, lesquelles exigent énergie et pugnacité. Or le nouveau champion du Front de Gauche n'a jamais été un champion des confrontations d'homme à homme. C'est dire si ses qualités de "généralissime" sont assez discutables, et que les références à la Révolution française frisent le ridicule !


J'ai déjà évoqué ailleurs l'alignement de Jean-Luc Mélenchon sur la doctrine belliciste de la droite française au sujet de l'expédition libyenne. Voilà qui devrait lui coûter un paquet de voix parmi tous ceux et toutes celles qui ont vigoureusement condamné cette agression, flairant de mauvaises arrières-pensées derrière la pseudo mission humanitaire. 

Autre thème cher à Mélenchon : la Sixième République.

Là encore, je suppose que ceux qui ne connaissent pas Jean-Luc Mélenchon sont ravis de voir quelqu'un proposer une avancée sur le plan institutionnel, là où Hollande se contente de vouloir chausser les pantoufles de De Gaulle, des pantoufles assurément trop grandes pour lui !


Seulement voilà, quand on dispose d'archives, ce qui est mon cas, et quand on connaît un peu la cuisine interne du Parti Socialiste, on flaire très vite l'embrouille planquée derrière un slogan du type : "Vite, la 6ème République !".

Parce que ça fait un petit moment que Mélenchon en parle, de ce serpent de mer qu'est la 6ème République. 

Les deux archives qui suivent datent de 1990 et 1992.



Hé oui, le slogan "Vite, la 6ème République !" avait déjà servi en 1990 et 1992, ça fait deux décennies !

C'était notre rubrique "Rions un peu !".


Rions un peu ? Oui et non ! Et c'est là qu'il faut avoir un peu de mémoire : novembre 2008, congrès socialiste de Reims. Jean-Luc Mélenchon est encore membre du parti. Vient le vote des militants, à l'issue duquel la motion de Ségolène Royal vire en tête. Et c'est cela qui va inciter Mélenchon - qui ne veut pas de Ségolène Royal à la tête du parti - à faire dissidence et à aller fonder son Parti de Gauche. La nomination du premier secrétaire du PS interviendra après le départ de Mélenchon ; ce sera Martine Aubry, à la suite d'acrobaties tripatouilleuses qui ont défrayé la chronique.

Pourquoi cet épisode est important ? Il se trouve qu'au Parti Socialiste, Ségolène Royal est la seule quasiment à avoir opté pour une sortie de la Cinquième République, la Sixième République figurant en bonne place dans son pacte présidentiel  de 2007. Mélenchon le sait. En soi-disant partisan de la 6ème, il sait qu'il pourrait trouver en Royal une alliée de choix. Et pourtant, par pure bravade ou à la suite de je ne sais quelle réaction épidermique ou bêtement caractérielle - propre à toutes ces gens incapables de faire la part de l'essentiel et de l'accessoire -, Mélenchon va se priver d'une alliance avec le clan Royal qui aurait pu faire considérablement avancer les choses au congrès de Reims.

Et maintenant, il nous explique, Place de la Bastille, qu'il faut "vite, une 6ème République". Incohérence quand tu nous tiens !

C'est dire que Mélenchon ne me fait pas rire. Tout le contraire ! Cet homme n'est pas plus révolutionnaire qu'une bouteille de coca cola, et sa Sixième République n'est que du vent. Mélenchon est d'abord et surtout imbu de lui-même. Seulement voilà, contrairement à une Ségolène Royal qui, toute jeune, s'en allait arracher à la droite une circonscription (Melle/Deux Sèvres) réputée ingagnable, circonscription que Royal a transmise depuis à Delphine Batho, Mélenchon n'a jamais gagné de siège à l'Assemblée Nationale. C'est maintenant qu'on va voir ce que vaut ce général autoproclamé : chef de guerre ou baudruche ? Dans le premier cas, le Parti de Gauche (entre nous, le Front de gauche, cimetière du Parti Communiste..., laissez-moi rire !) rafle des sièges à l'Assemblée Nationale. Dans le second cas, à savoir une déroute du Parti de Gauche aux législatives, comme je l'annonçais ailleurs, on n'entendra plus jamais parler du bien éphémère révolutionnaire du mois d'avril 2012. 





Notes :


Forme : 4/5
Fond : 2/10
Impression générale : 3/5
Total : 9/20