lundi 16 avril 2007

AND THE (2) WINNERS ARE...








Chers amis internautes,





Je dois être un fort mauvais blogueur, puisque ceux qui m'ont fait l'amitié de consulter ces pages ont constaté que le blog (...ecco-mio-blog...) est resté encalminé de longues semaines durant.

Mais je vous rassure, rien de grave ; simplement, une allergie certaine pour le délire médiatique entourant toute campagne électorale en France, surtout présidentielle. Et puis, lors de l'arrêt inopiné du blog, nous n'avions pas encore la liste complète des candidats... Alors, contrairement aux spécialistes de la masturbation neuronale, qui vous pondent des sondages sur les chances de candidats virtuels, moi, j'ai préféré attendre, pour avoir ceci :





Et c'est là que (c'est là où n'est pas français !!!!) j'ai entrepris d'étoffer mon carnet de notes...

Deux mots sur la méthode : le discours des candidats à la présidentielle a été passé au crible par un pédagogue, adversaire résolu de la démagogie sondagière. La technique utilisée est celle que l'on apprend dans toutes les bonnes universités : je suis parti d'une revue de presse toute simple, et j'ai rapproché les points de vue, en citant mes sources...
En principe, les deux candidats les mieux notés devraient se retrouver au second tour de la présidentielle...

Comme de bien entendu, le classement à venir ne tient aucun compte des sondages, cette pseudo-mesure-scientifique de l'état de l'opinion. J'y consacrerai de longs développements incessamment. Les notes relèvent d'un examen objectif (mais si, mais si !) et sans a priori des programmes, tout simplement.

Mais en attendant l'affichage des notes, sachez que, pour l'heure, ils ne sont qu'une poignée (guère plus de quatre) à avoir la moyenne, le/la candidat(e) le/la mieux noté(e) disposant d'une confortable avance sur le/la deuxième, au point de donner l'impression de "boxer dans une autre catégorie" que les onze autres, en raison, visiblement, de la qualité de sa préparation, de la cohérence de son parcours, de la densité de son programme ainsi que de la qualité (supérieure) de son équipe !


Ah, au fait, il paraît que les électeurs sont plus qu'indécis...






Ben ça alors !
Parce qu'en ce qui me concerne, il n'y a pas photo !

En tout cas, je vais me hasarder à faire un pronostic : parmi les internautes qui auront l'intelligence de lire ces lignes, il ne devrait pas rester plus de 0,0001 % d'hésitants ! Ce sera ma façon à moi de démontrer que la pédagogie, c'est bien plus efficace que la COM !

Concrètement, à la suite de la présente introduction, vous avez douze chapitres en cours de réalisation, comportant essentiellement des archives tirées de la presse écrite. Le tout sera suivi de commentaires circonstanciés et de l'affichage des notes (soit avant le mercredi 18 avril 2007). Il y aura des surprises et de "prestigieux" éliminés, je veux dire par là que, si je pouvais disposer des grands moyens d'information - dont certains ont usé et abusé -, ne serait-ce, par exemple, que d'une petite heure à la télévision ou à la radio, je me ferais fort de convaincre 99 % des électeurs de ce pays du bon choix pour la France (la formule est de Valéry Giscard d'Estaing) !

Je vous souhaite bonne lecture, en attendant la suite !


Question à mille euros : savez-vous combien il faut de tours de scrutin pour désigner un pouvoir exécutif et législatif opérationnel dans les pays suivants (je vous invite à inscrire le bon chiffre en face de chaque pays, et à méditer sur cette petite liste) :

Allemagne
Suisse

Autriche

Belgique
Lusembourg
Espagne

Grande-Bretagne

Pays-Bas
Danemark
Suède

Norvège
Finlande
France
Etats-Unis d'Amérique
Pologne
Italie
Zimbabwe
Burkina Faso
Gabon
Congo
(ex) Zaïre
Botswana
etc.

(Liste non exhaustive ; on pourrait y ajouter pas mal de républiques bananières, arachidières, cacaoyères, sucrières, pétrolières, diamantifères... d'Asie, d'Afrique, d'Amérique latine et d'ailleurs, voire d'Europe !)

Le but de l'exercice est de regrouper ces pays en fonction d'un seul critère : l'ergonomie (efficacité du système électoral en termes d'économie de moyens) institutionnelle : je rappellerai simplement que, pour presque toutes les grandes démocraties, le bon chiffre c'est '1' [UN !] !


Lu dans la presse :












Mais, au fait, j'ai oublié de vous parler d'autre chose : de l'objectivité !

Des notes, j'en distribue depuis pas mal de temps déjà, question de déformation professionnelle. C'est ainsi qu'en marge du referendum autour de la Constitution Européenne d'il y a deux ans, je m'étais fendu d'un fort long
"Petit Courrier" (Mai 2005 ; 220 pages A4 !) que j'évoque quelque part sur l'un des blogs, et qui m'a valu de prestigieux accusés de réception. Il a donc été lu... Et dans ce texte, il y avait un carnet des notes que j'attribuais aux principaux intervenants de la campagne référendaire. Vous le trouverez ci-dessous.

Et c'est là que j'aimerais revenir sur l'objectivité, car les appréciations qui suivent ont été appliquées sans le moindre a priori partisan, ni
pro, ni contra ; je me suis uniquement fié à mon intuition du moment et à l'impression plus ou moins positive que les intervenants ont produite sur moi.

C'est exactement le même esprit qui m'a animé cette fois-ci, et je défie quiconque de me suspecter d'un quelconque manque d'OBJECTIVITÉ !

Carnet de notes (mai 2005)

Ce qui suit est une tentative de synthèse du débat sur la ratification du traité constitutionnel européen, tel qu'il a été perçu par un observateur neutre et objectif, si tenté que ces termes veuillent encore dire quelque chose.

Et comme la pédagogie, c'est encore ce que je comprends le mieux - la communication étant à la pédagogie ce que le les œufs de lump sont au caviar -, je m'en vais essayer d'expliquer à messieurs Saussez, Giacommeti, Rozès et autres Cayrol…, ainsi qu'à certains de leurs clients de la classe médiatico-politique, un certain nombre de choses qui risquent de leur échapper encore longtemps !

D'abord, qu'on ne gouverne pas un pays avec les sondages !

Depuis le "qui au second tour contre Balladur ?", entendu lors d'une fameuse émission dirigée par Michèle Cotta, je croyais que les journalistes, politologues et autres politocrates avaient compris que 65 % de mille personnes, ça ne faisait jamais que 650 personnes ! Mais il faut croire que les journalistes, politologues et autres politocrates souffrent d'amnésie chronique !

Imaginons que le "oui" l'emporte, dimanche 29 mai, et l'on entendra les mêmes expliquer qu'il y a eu un sursaut…, que la dernière intervention de Chirac a mobilisé les derniers hésitants, que les tenants du "non" ont commis quelques erreurs de dernière minute, que la baisse de température n'y est pas étrangère, etc.

Á tous ces politologues et autres politocrates, spécialistes de la navigation à vue, j'accorderais volontiers la note de 5 sur 20. Finalement, rien n'est plus synthétique qu'une moyenne arithmétique pour se faire comprendre. Allons-y, donc, pour la distribution des prix.

Chirac 1 : 16 sur 20. Pour avoir saisi les Français par referendum. Il eût été tellement plus simple de faire comme à peu près tout le monde et d'obtenir une ratification de type soviétique par le Congrès ! Il paraît que Chirac s'est fait tirer l'oreille, peu importe, mais un referendum général dans toute l'Europe eût mieux valu... !

Convention Giscard : 5 sur 20. Pour n'avoir pas su imposer à toute l'Europe un mode de ratification résolument populaire, ce que l'on comprend mal. Il est étrange, en effet, que les pères du traité et les gouvernants européens n'aient pas cru bon de devoir solenniser l'adoption de ce texte et n'aient pas vu qu'en l'absence de la convocation (de l'élection) d'une assemblée constituante en bonne et due forme, seule une ratification populaire pouvait donner à ce texte l'onction constitutionnelle susceptible d'asseoir sa légitimité.

Le préposé à la communication du Parti socialiste : 2 sur 20. Pour avoir pondu cette archi-nullité qu'est le tract reproduit plus haut (en fait, deux tracts), où le P.S. invente le T.C.N.I. : Traité Constitutionnel Non identifié. C'est très simple : il n'y a pas un seul article cité dans le tract, ce qui n'a pas semblé déranger le Premier Secrétaire, lequel a apposé sa signature au bas du document. Ce qui fait que les millions de Français, qui ont reçu le tract dans leur boîte à lettres, ont dû se triturer les méninges pour retrouver les passages correspondants du traité constitutionnel.

Morceaux choisis (les commentaires entre parenthèses sont de moi) : Vous informer… Que contient le traité constitutionnel ?… Nous voulons vous informer du contenu (!) du traité et vous aider (!) à prendre votre décision… Un Ministre des affaires étrangères est créé… La Charte des droits fondamentaux pour les Européens… Le Parlement européen aura plus de pouvoirs…

On a quand même pris soin de mentionner, dans la marge, la section correspondante du traité : partie I, partie II, partie III, mais, pour le reste, le lecteur est invité à jouer à colin-maillard…

On a même eu droit à de véritables perles, comme celle-ci : Il sera désormais possible de modifier certaines parties (!) du traité sans avoir à changer tout le traité ; bizarrement, personne n'a fait mention de cette innovation au cours de la campagne !

Mais le plus fort, c'est peut-être ceci : Un million de citoyens de l'Union peuvent déposer une proposition de loi européenne par voie de pétition, ce qui est absolument faux, l'article I-47.4 ne faisant aucune mention d'une quelconque "proposition de loi européenne" !

En tout cas, les sympathisants socialistes ont dû beaucoup s'amuser !

Debout la République (Nicolas Dupont-Aignan) : 16 sur 20 pour le tract. Tout le contraire du tract socialiste : celui-ci est concis, aéré, parfaitement lisible : (…) Lisez l'article 25 : Avec la Constitution, le pouvoir de chaque Etat est réparti en fonction de sa population. Avec 100 millions d'habitants dans 30 ans, la Turquie deviendrait le pays le plus peuplé et donc le plus puissant… La preuve : Le premier Ministre turc a signé à Rome, le 29 octobre, le projet de constitution

(…) Lisez l'article 305 : Il est créé un poste de Ministre des Affaires étrangères européennes. La France devra négocier sa position avec celle du Ministre des Affaires étrangères de l'Union européenne… La preuve : La politique de sécurité et de défense européenne se soumet à celle de l'OTAN sous direction américaine (article 41§7), etc.

Bref, on n'est pas obligé de partager les thèses du groupe Debout la République pour trouver que leur tract est plutôt bien foutu, tout le contraire du tract socialiste.

Parti communiste : 16 sur 20 pour la campagne audiovisuelle. Céder tant de temps de parole aux petits camarades du "Non de gauche" (Mélenchon, Besancenot…), ça s'appelle de l'altruisme ! Cela dit, quand je lis le tract communiste, je constate qu'il ne conteste que 5 % à peu près du texte constitutionnel, essentiellement issus de la partie III ; cela veut-il dire qu'il approuve les 95 % restants ? Dans ces conditions, pourquoi ne pas le dire ?

José-Luis Zapatero : 2 sur 20 pour le cavalier seul espagnol en matière de régularisation des sans-papiers. Et je délivrerais volontiers la même note à l'ensemble de la classe politique française pour le silence radio observé en la matière !

C'est tout de même incroyable : la France ne peut pas revoir les taux de la TVA sur la restauration, au prétexte qu'il faut l'unanimité des pays de l'Union, mais un pays, en l'occurrence l'Espagne, peut décider unilatéralement de régulariser des clandestins, au risque de les voir envahir l'ensemble de l'Union ; et là, silence radio ! Décision souverainiste, cela va sans dire, ce qui explique le silence assourdissant des partisans souverainistes du "Non", Le Pen en tête. Le problème est que, dans le camp du "Oui", soutenu par Zapatero, on n'a pas su quoi dire non plus ! Erreur colossale, car elle mine gravement la crédibilité des institutions européennes : dès lors que l'Espagne n'est, pour eux, qu'un marchepied vers le reste de l'Europe, on imagine que la régularisation des 700.000 clandestins (dont beaucoup de non-hispanophones) va conduire à une véritable dissémination de centaines de milliers d'entre eux vers les pays voisins ; et dans ce cas, que fait-on ? On rétablit les contrôles à la frontière, donc on revient en arrière sur tous les acquis de Schengen ?

Le cavalier seul de Zapatero a suscité des protestations ici ou là, notamment aux Pays-bas. Je m'attends à ce qu'il coûte des points au camp du "oui".

Sa suffisance, Giscard Ier : 5 sur 20 pour la campagne. Beaucoup le disent suffisant et hautain. Il faut dire qu'il n'a pas fait grand chose pour les démentir ! "Le texte constitutionnel serait bon parce que "EGO" y aurai(s)(t) puissamment contribué." L'ancien président de la République veut bien faire campagne, mais uniquement dans des réunions avec des premiers de la classe. Le peuple ? quel peuple ? C'est pourtant lui qui constitue le gros des électeurs, mais c'est peut-être un détail ! Pourquoi pas, après tout ! Donc, on ne pouvait rien y changer. Admettons ! Mais comment expliquer que notre grand homme ait à ce point tourné le dos au peuple, en préférant s'enfermer dans un tête à tête entre grands esprits, ses interlocuteurs de prédilection étant les élèves des grandes écoles ? On a donc vu l'ex-président de la République faire campagne, mais uniquement dans des réunions avec des premiers de la classe. Le peuple ? quel peuple ? C'est pourtant lui qui constitue le gros des électeurs, mais c'est peut-être un détail !

Chirac 2 : 12 sur 20 pour sa première intervention télévisée, le débat avec les jeunes électeurs. Á vrai dire, Jacques Chirac n'est pas en cause dans cette affaire, mais quel concept foireux d'émission ! Quatre-vingt-combien de jeunes déjà ? Quand on divise deux heures par 80, on arrive facilement à pas grand chose, d'où un morcellement du débat et une frustration des participants, mais aussi des spectateurs ! Bref, une émission pour rien ! Á ceci près qu'il y a ceux qui s'efforcent de se coltiner avec le public le plus large, dans toute sa diversité, et il y a ceux qui préfèrent rester entre gens de bonne compagnie ! Je corrige, donc, la première impression (foireuse) : l'émission a quand même servi à révéler le taux de frustration que subit la jeunesse actuelle, et dont les récentes manifestations lycéennes n'ont été qu'un révélateur, parmi d'autres.

Nicolas Sarkozy : 10 sur 20 pour la campagne audiovisuelle. Je souhaite que l'Europe change, bouge, évolue, s'améliore… Ça avait un côté mobutiste ! Il faut dire que le Maréchal-Président était coutumier des messages enregistrés de ce genre, que les médias officiels distillaient quotidiennement en direction du bon peuple zaïrois. Cela dit, qu'est-ce que le "je" du président de l'UMP est venu faire dans la campagne ?

Le résultat de la campagne de l'UMP est qu'il a été plus question de son président que des projets européens du parti : Sarkozy avec Madame Chirac, Sarkozy qui a un léger coup de pompe, Sarkozy qui se confie au micro de France 3… On me dira que, d'après les sondages, le oui l'emporte parmi les sympathisants UMP. Et là, je m'interroge : chez les paysans aussi ? Chez les ouvriers aussi ? Ça se saurait quand même, si les paysans étaient majoritairement pro-européens !

Plans B., C. comme Bolkestein, Chine : 2 sur 20 pour les institutions européennes. D'abord, il a fallu réagir, dare-dare, après l'émergence de l'affaire (pourtant ancienne) de la proposition de directive dite "Bolkestein". Il y a eu également ces patrons suggérant à leur personnel une reconversion en Roumanie ou à l'Île Maurice, pour 110 euros mensuels ; mais il y a eu, surtout, l'affaire des textiles chinois. Et c'est là qu'on se dit que, décidément, ils ne sont pas très doués, à Bruxelles, et pas qu'à Bruxelles !

Revenons à l'interview de M. Barnier dans le quotidien 20 Minutes (28 avril 2005).

Question : L'Union semble paralysée sur la question du textile chinois. Qu'y changera le traité ?

Réponse : L'Europe n'est pas paralysée. Paris vient de demander l'application de la procédure d'urgence pour qu'on adopte des mesures en faveur des industriels du textile. Le traité va accroître le poids de la France

Beau numéro de langue de bois. Michel Barnier a pourtant fait partie des meilleurs défenseurs du "Oui", durant la campagne. Mais là, entre nous, il nous mène en bateau. Du reste, il commence par répondre à la question, pour virer immédiatement de bord et parler d'autre chose (le poids de la France). Car, enfin, les Chinois n'ont imposé d'ultimatum à personne ! Toutes ces questions de commerce international font l'objet de négociations qu'on imagine très longues et plutôt bien organisées dans le cadre de l'OMC. Disons que les Chinois ont bien tiré leur épingle du jeu en matière de textile. De là à recourir à la procédure d'urgence sur des faits programmés de longue date, voilà qui dénote d'une étonnante imprévoyance des Européens !

Par ailleurs, on ne voit pas pourquoi certains pays ne seraient là que pour "nous" acheter "nos" Airbus et "nos" centrales nucléaires, tandis que "nous" nous réserverions le droit de rejeter leurs marchandises.

Dans tout ce débat, il y a une expression que je n'ai entendue dans la bouche de personne : BALANCE DES PAIEMENTS !

Au lieu de nous bassiner avec ces histoires de plombiers polonais, de chemises chinoises, pakistanaises, de call-centers marocains, indiens…, qu'on nous parle plutôt de la balance des paiements : qui gagne quoi et au préjudice de qui ?

Si le Tiers-monde et les pays émergents gagnaient de l'argent au détriment des pays industrialisés, ça se saurait tout de même, non ?

Plan D. comme Delors : 5 sur 20. Comment résister au crépitement des flashes quand on se retrouve brusquement propulsé au premier plan (d'aucuns ont moqué l'inflation de retraités encombrant les allées du camp du "oui"), alors même que tout le monde vous croyait jeté aux oubliettes. Voilà, donc, notre Jacques Delors contraint de reprendre du service pour le "oui". Et au lieu de dire : "un plan B ? Peut-être, mais je ne suis pas dans le secret des dieux !", ne voilà-t-il pas qu'il se prend pour le paon faisant la roue ! En tout cas, si son pataquès devait coûter la victoire au "oui", il ferait un bouc émissaire bien commode !

Lionel Jospin : 15 sur 20. En meeting ou à la télévision, Jospin a été percutant, direct, pédagogue, avec des formules simples et parlantes : quand on se marie ou se pacse, on dit "oui" à son partenaire, pas au maire !

Où je ferai une réserve, c'est lorsque j'entends Lionel Jospin déclarer ceci : "J'ai fait l'exercice d'écouter ce que disent les leaders du non…" (France 2, 24 mai 2005). Lionel Jospin est-il certain que le "non" n'est piloté que par les fameux "leaders", dont il a résumé les déclarations ? Je suis persuadé qu'il y a plein de gens qui vont voter "non", uniquement pour manifester leur propre perception négative de l'Europe (et ce ne sont pas les arguments qui manquent, actuellement : euro, délocalisations, Bolkestein, textile chinois, paysans, marins pêcheurs, buralistes, etc.).

Mais, s'agissant de Lionel Jospin, il y a une catégorie de partisans du "non", dont on ne parle pas du tout, ce qui est étrange : les Franco-musulmans !

Entendu, récemment, sur une radio "orientale", un débat avec Harlem Désir, que j'ai trouvé brillant (Désir), ce qui ne l'a pas dispensé d'une véritable séance de torture… Les auditeurs de cette radio n'avaient visiblement pas digéré l'incident de Bir Zeit, cette localité universitaire de Palestine, où Lionel Jospin s'est fait "caillasser", après avoir traité le Hezbollah de mouvement terroriste. Cela lui a valu un "contrat" qui a débouché sur la présence de Le Pen au second tour de la présidentielle. Les sondages et les politocrates n'en ont pas parlé, tant pis pour eux ; mais ce dont je suis certain, c'est que la défaite de Jospin en 2002 doit beaucoup à l'électorat arabo-musulman, qui avait juré sa perte, lequel électorat s'est de nouveau enflammé lors du débat susmentionné avec Harlem Désir. Ce qui me fait penser que Jospin risque de cristalliser, de nouveau, tous les ressentiments de la communauté maghrébine contre lui, donc contre son camp.

Et puisque nous en sommes à évoquer cette communauté, dois-je rappeler que ce referendum sera la première grande occasion offerte aux musulmans de France, de s'exprimer dans les urnes, depuis le vote de la loi dite Stasi ?

J'ai quelques raisons de penser que, malgré l'ouverture à la liberté de conscience assurée par l'article II-70 du traité constitutionnel, favorable à la liberté de pensée, de conscience et de religion, l'immense majorité des musulmans de ce pays risquent de rejoindre le camp du "non". Et quand on évalue le nombre de Français d'origine arabo-turco-maghrébine, on se dit que cette communauté a les moyens de faire battre n'importe qui !

Danièle Mitterrand : 16 sur 20. La même impression que Jospin, mais dans l'autre camp. Elle a parlé, trois à quatre minutes, à la télévision. Elle a même fini par lire du Mitterrand, dans le texte ! Ce fut court mais percutant.

Jean-Claude Martinez : 16 sur 20. Campagne télévisée du Front national. Je ne suis pas un sympathisant du F. N., mais je suis tombé, un jour, sur un spot de la campagne référendaire : sur un ton patelin, ôtant puis chaussant ses lunettes, ce type parlait de l'Europe ; il n'a pas dit un mot de politique ; il a juste parlé d'histoire, de culture, d'Europe. Le plus fort est qu'il avait l'air d'improviser complètement son texte !

Laurent Fabius : 5 sur 20. J'ai failli ne pas le noter. Les militants PS ayant voté en faveur du "oui", il fallait respecter la règle communément admise, car, sinon, il n'y a plus de règle ! Une chose m'intrigue chez Fabius, c'est lorsqu'il dit qu'il y a de bonnes choses dans les parties I et II du traité, alors que d'autres, dans la partie III, lui déplaisent énormément. Oui, mais lesquelles, sachant que M. Fabius a été Premier ministre et qu'il a, donc, signé un certain nombre de traités qui se trouvent précisément incorporés dans cette fameuse partie III ?

Henri Emmanuelli : même chose et note que Fabius, Mélenchon et consorts. Mais il y a autre chose : en fin de débat télévisé, l'autre jour, Michel Barnier conclut qu'il est quelqu'un qui veut aller de l'avant, et c'est là qu'Emmanuelli lui rétorque qu'il est quelqu'un qui veut que la France fasse entendre sa voix. Pour mémoire : il n'y a pas de groupe "France" au parlement européen ! Du coup, on se dit : Mince alors ! On le croyait internationalisteet voilà qu'on le découvre franchouillard, à moins qu'il ne soit devenu nationaliste. Les mauvaises langues parleront de "lepénisation" des esprits ! (Section Française de l'Internationale Ouvrière ; Internationale Socialiste…)

Chirac 3 : 14 sur 20 pour la deuxième intervention télévisée, face à Pujadas et Chabot. Comme quoi, deux journalistes ayant bien préparé leurs dossiers peuvent très bien faire l'affaire.

Jack Lang et le show-biz : 8 sur 20. On a vu le beau linge réuni par Jack Lang : brillantes stars, acteurs, actrices, artistes, écrivains… tous favorables au "oui" au traité constitutionnel. Et puis, plus rien. A-t-on réalisé, chez les amis de Jack Lang, que ces stars un peu trop riches risquaient de braquer le petit peuple contre l'oligarchie des nantis ? Toujours est-il qu'elles ont brillé par leur absence dans la campagne. Étrange !

Conseil Supérieur de l'Audiovisuel : 0 (zéro) sur 20 pour le décompte des temps de parole. C'est quand même incroyable : le Président de la République mène campagne pour le "oui", mais allez savoir pourquoi, son temps de parole n'est pas décompté ! Il n'y a que dans les républiques bananières, arachidières, cacaoyères, sucrières… que l'on voit des choses pareilles ! Le comble est que je ne suis pas sûr que cela serve le camp du "oui" ; je serais même de l'avis contraire : ce manque d'équité a fort bien pu valoir aux partisans du "non" un surcroît de sympathie !

Manuel Valls et le "non" civilisé et bien élevé : 16 sur 20. Le maire d'Evry (91) faisait initialement partie du camp du non. Après le referendum interne au parti socialiste, il a décidé de se soumettre à la volonté de la majorité des militants. La vie en société requiert qu'on respecte les règles que l'on s'est librement choisies. Il faut regretter que la bonne éducation de certains (on n'a pas vu Peillon, à peine entendu Montebourg…) ne soit pas partagée par tous, au P.S.

Dominique Voynet : 16 sur 20 pour avoir eu le courage de dire : finalement, je comprends les hésitants, à qui l'on a toujours expliqué que lorsque quelque chose ne marche pas, c'est la faute de l'Europe ! Faire l'effort de comprendre l'adversaire est toujours une marque d'intelligence ; ça s'appelle de l'honnêteté intellectuelle et l'on se rappelle que Mme Voynet est médecin de formation : dans les sciences, ce sont les faits qui commandent, pas les idéologies !

Marie-George Buffet : 16 sur 20 mais uniquement pour sa dernière apparition lors de la campagne audio-visuelle (vendredi 27 mai 2005). Pendant cinq ans, en tant que Ministre des Sports, Mme Buffet a abondamment usé du vocable "dopage". Durant cette campagne référendaire, il m'a semblé que son vocabulaire s'était enrichi d'un nouveau vocable : "libéral(e)", qu'elle sortait toutes les deux ou trois phrases ! Et je dois dire que j'ai frisé l'overdose ! Or, divine surprise, lors de sa dernière intervention télévisée, pas une fois Mme Buffet n'a eu recours à ce poncif. Du coup, elle nous a livré, là, sa meilleure prestation de toute la campagne !

Chirac 4 : 17 sur 20 et 7 sur 20 (moyenne : 12 sur 20). Allocution radio-télévisée du 26 mai 2005. J'ai failli ne pas lui donner de note. Cela a commencé sur un ton tout ce qu'il y a de gaullien. Et là, même moi, j'ai été épaté. Et puis, il y a eu cette allusion à une impulsion nouvelle à notre action. Du coup, je me dis : "Hou la la ! il ne va pas nous faire le coup de la politique intérieure, après avoir juré aux jeunes, lors du premier débat, que ce referendum n'avait rien à voir avec la politique intérieure de la France !"

Bilan : une impression mitigée. Chirac a tenu là un de ses meilleurs discours, jusqu'à l'allusion à la politique intérieure, laquelle n'a rien à voir dans le présent débat, à moins que Jacques Chirac n'ait choisi, lui aussi, de donner raison à Mme Keller et M. Grossmann : "je suis celui qui toujours nie…!"

Le camp du "Non" : 8 sur 20. Le problème est que l'on n'a pas vu beaucoup d'Européens autour des partisans du "non" ! Besancenot a eu beau affirmer qu'il s'agissait d'un "Non social et internationaliste", il faut croire que les trotskystes européens sont une espèce en voie de disparition !

Le plus embêtant a été d'entendre des gens rejeter 448 articles en bloc, sans jamais dire : "là, c'est bien, on approuve, là, c'est moins bien, on désapprouve !" Un peu d'honnêteté intellectuelle n'aurait pas fait de mal, ici ! Et puis, il faut tout de même se rendre à l'évidence : renégocier, oui, mais quoi ? La fameuse partie III, décriée par tous les partisans du "non", se trouve être une compilation de traités déjà ratifiés par la France, et ce, depuis des lustres, y compris par Fabius lui-même, en tant que Premier Ministre. Renégocier, peut-être, mais certainement pas les traités déjà entrés en vigueur ; et là, le camp du "non" manque de cohérence !

Le camp du "Oui" : 12 sur 20. Il semble évident que les vrais européens se trouvent dans le camp du "oui". On est venu de toute l'Europe pour soutenir le "oui". C'est une donnée objective. Alors, comme dirait Chirac, pourquoi toutes ces craintes, pourquoi toutes ces hésitations ?

Probablement à cause de Bolkestein, de la Chine (qui n'y est pour rien !), du plan B, qui n'existerait pas, de la suffisance d'élites vivant à des années-lumière du peuple, des services publics qui disparaissent bel et bien… D'où ce "oui" qui semble manquer de souffle, sorte de service minimum !

Comment ne pas parler de service minimum, lorsqu'on observe le jeu de massacre qui semble amuser les partisans du "oui" : se combattre entre "alliés". C'est Brice HortefeuxSarkozy et Hollande, qui posent, énamourés, à la Une de Paris-Match, pour s'en aller, trois jours plus tard, se disputer sur RTL ; ce sont certains "éléphants" du P.S., tirant à vue sur leur "allié" de l'UMP, Jean-Pierre Raffarin, sommé de se taire, de se cacher... On hésite entre le manque d'éducation, la stupidité, la perte de sang-froid. Fort heureusement, d'autres se sont tus, par dignité et sens des responsabilités. qui tape sur Jospin, oubliant que tous deux défendent le "oui" ; ce sont

Détail intéressant : dans le camp du "non", personne n'a tapé sur personne !

Arnaud Montebourg : pas noté. C'est pourtant à lui que je décernerais volontiers la note la plus élevée (soit au moins 17 sur 20), parce que, durant toute cette campagne, il est le seul à avoir dit l'essentiel - même si je ne prétends pas avoir écouté tous les débats. Que ce soit dans le camp du "oui", que ce soit dans le camp du "non", personne ne s'est posé cette question, pourtant fondamentale : qui est le souverain dans l'Europe qui se construit ? Il faut croire que, pour beaucoup, ce n'était qu'un détail !

Je n'ai pas noté Montebourg pour les raisons que j'explicite plus bas.


(...)


Le souverain

On a dit beaucoup de choses au cours de cette campagne référendaire ; mais si je devais n'en retenir qu'une, ce serait la déclaration d'Arnaud Montebourg, à qui on peut, toutefois, reprocher de ne pas être allé plus loin : (…) Qui est le souverain ? Ce sont les peuples. La France montre la voie. Il n'y a pas de fatalité à ce que les décisions des dirigeants s'imposent inéluctablement.

C'est ce qui s'appelle "parler de l'essentiel", le reste étant parfaitement accessoire : la Commission, le Parlement européen, le Ministres des Affaires étrangères de l'Europe, le Conseil des Ministres, tous ces organes ou personnalités sont aux ordres d'une seule instance : le peuple souverain. Trop de gens semblent avoir oublié cette évidence. Arnaud Montebourg a bien fait de la rappeler.

Mais, précisément, pourquoi s'est-il arrêté en si bon chemin ?

Je suis persuadé qu'il y a un point sur lequel partisans des deux camps ne pourraient que s'accorder : le pouvoir au peuple !

Et c'est là que les partisans du "oui" nous certifient que le traité constitutionnel accorde des droits supplémentaires aux citoyens, grâce au principe de la démocratie participative, consacré par l'article I-47.4, au point que le P.S., emporté par son élan, en rajoute dans l'hyperbole : "un million de citoyens… pourront déposer une proposition de loi…"

On comprend mieux pourquoi l'auteur de la plaquette publicitaire du P.S. n'a pas jugé utile de citer les références exactes du texte :

"Article I-47.4 : Des citoyens de l'Union, au nombre d'un million au moins, ressortissants d'un nombre significatif d'États membres, peuvent prendre l'initiative d'inviter la Commission, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu'un acte juridique de l'Union est nécessaire aux fins de l'application de la Constitution


Je ne vois pas très bien où il y serait question d'une proposition de loi.

Mais reprenons le texte ; il s'agit, pour un million de pétitionnaires, de :

  • inviter la Commission ; or, invitation ne vaut pas injonction ni obligation ;
  • dans le cadre de ses attributions : voilà qui est clair ! On ne sort pas du cadre, sinon ce sera non ! Les pétitionnaires ont intérêt à bien analyser les attributions de la Commission ;

  • la Commission soumettrait une proposition appropriée. Normal : Barnier et Chirac nous ont répété que la Commission avait pour vocation de proposer ; le Parlement et les gouvernements ont pour vocation de décider

Question : dans ces conditions, pourquoi soumettre une pétition à un organe qui ne décide de rien et ne pas s'adresser directement au Parlement et/ou au Conseil des ministres ?

  • des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu'un acte juridique de l'Union est nécessaire ;

Question : et si la Commission et, a fortiori, les instances décideuses (Parlement et Gouvernements) ne partagent pas cet avis, en clair ne considèrent pas qu'un acte juridique de l'Union soit nécessaire ?

I-26.2 : Un acte législatif de l'Union (cf. I-47.4 : acte juridique) ne peut être adopté que sur proposition de la Commission, sauf dans les cas où la Constitution en dispose autrement. Les autres actes sont adoptés sur proposition de la Commission lorsque la constitution le prévoit. §

  • aux fins de l'application de la Constitution : ce qui exclut tout autre domaine.

Entre nous, en mettant en avant le concept de "proposition de loi", alors que, de toute évidence, il n'en est rien ici, le parti Socialiste n'a-t-il pas pris la mesure des insuffisances de ce principe de démocratie participative ? Et, dans l'affirmative, pourquoi a-t-il fait croire à tout le monde que nous tenions là un progrès considérable ?

En ayant voulu enjoliver le texte constitutionnel, le Parti Socialiste a, sans le vouloir - mais peut-être l'a-t-il voulu - rendu un grand service au camp du "non", lequel, chose extraordinaire, n'a pas cru bon de devoir saisir la perche !

Précisément, si j'en veux personnellement à Arnaud Montebourg, ce n'est pas de s'être soumis à la discipline interne du parti, c'est d'avoir parlé, mais à moitié seulement ; en clair, d'avoir presque levé un gros lièvre, sans pourtant aller au bout de sa logique car, du coup, il aurait dû dénoncer en des termes plus catégoriques ce fameux article I-47.

Parce que, si le souverain, c'est le peuple, comment peut-il se contenter de quémander à une Commission, sans pouvoir décisionnel, l'examen hypothétique d'une pétition... Est-ce qu'au temps de la Monarchie absolue, le souverain (le roi) adressait des pétitions aux corps qui lui étaient inféodés ? Où a-t-on vu cela ?

I-26.4 : Les membres de la Commission sont choisis en raison de leur compétence générale et de leur engagement européen et parmi des personnalités offrant toutes garanties d'indépendance. (Très drôle, lorsqu'on apprend le rôle des lobbies bruxellois !)

Autoriser le peuple à soumettre une pétition à la Commission signifie clairement que le premier est placé sous (!) l'autorité de la seconde, ce qui est contraire au concept même de souveraineté si bien esquissé par Arnaud Montebourg.

Le plus amusant, c'est cette prétentieuse exégèse que l'on doit au Monde (14 avril 2005), qui parle d'un appel à signatures, à travers l'Union européenne, pour obliger (!) la Commission à revoir une proposition de texte européen ou à en faire une sur un sujet donné…, analyse relevant, de toute évidence, d'une mauvaise lecture du texte du traité, voire d'une imposture !

En clair, lorsqu'on apprend comment les divers lobbies s'y prennent pour tirer les ficelles à Bruxelles, on se dit que seul un surcroît de démocratie pourrait prévenir l'Union Européenne de toute dérive eurocratique. Et, de ce point de vue, cet article I-47 est une plaisanterie !

En un mot comme en cent, cet article ne vaut rien !

Et je regrette beaucoup que peu de monde - exceptés le mouvement "Debout la République" de manière explicite, et le Parti Socialiste de manière implicite !!! - se soit manifesté pour faire ressortir l'embrouille contenue dans ce fameux article 47.

Extrait du tract "Debout la République", Nicolas-Dupont-Aignan : "(…) Pour les partisans du "oui", la constitution renforce la démocratie. C'est faux !

Lisez l'article 396 : Dans 25 nouveaux domaines (dont l'immigration, art. 267), les décisions ne sont plus prises à l'unanimité mais à la majorité. Un État ne peut plus s'opposer, au nom de son peuple, à une loi européenne contraire à ses intérêts. Les élections nationales sont vidées de leur sens.

Lisez l'article 167 (…). Lisez l'article 47§4 : Le "droit de pétition" n'est que "poudre aux yeux" et n'entraîne aucune obligation pour la commission."

(…) On tue nos démocraties nationales sans créer une vraie démocratie européenne. La Commission de Bruxelles peut aller encore plus loin. Après l'autorisation des OGM, la privatisation d'EDF, le rétablissement du travail de nuit des femmes. A qui le tour ?"

Les partisans du "oui" estiment qu'il n'y a rien à modifier dans le texte du traité, qu'une renégociation n'est pas à l'ordre du jour, que, de toute façon, la France risque d'être isolée…

Les partisans du "non" nous disent que ce texte n'est pas bon, qu'il est illisible, incompréhensible, qu'il est antidémocratique…

Et là, je suis au regret de dire aux ténors des deux camps, qu'il y avait pourtant une solution simple, le genre de choses qui vous permet de mettre l'adversaire "échec et mat" : car, si j'avais dû trancher entre le "oui" et le "non", j'aurais mis tout le monde d'accord en prônant le "Oui au traité constitutionnel, mais à la condition de virer l'article I-47."

Et pour ce faire, on ne renégocie rien, mais on introduit une Partie V, comportant un article unique titré : "Du souverain", avec rappel du principe selon lequel, en démocratie, toute souveraineté procède du peuple… Raison pour laquelle est instauré le principe du referendum d'initiative populaire sur l'ensemble de l'Union Européenne, referendum déjà pratiqué en Italie, mais aussi (hors Union) en Suisse, Californie, pays qui ne passent pas pour être soumis à l'anarchie.

Celui des deux camps qui brandissait cet argument aurait fait mordre la poussière au camp adverse.

Instaurer le referendum d'initiative populaire dans l'Union Européenne, entre nous, qui oserait voter contre ?

Avec une telle arme :

  • on désamorce la grenade turque ;

  • on ouvre la porte à la Suisse (on n'imagine pas les Suisses acceptant de rejoindre, un jour, un ensemble politique moins démocratique que le leur) ;

  • on neutralise le lobbying (une directive ou loi européenne visiblement manipulée par les lobbies pouvant être purement et simplement annulée par un vote populaire) ;

  • on écrabouille par avance toutes les critiques qui pourraient s'appuyer sur une éventuelle dérive eurocratique.

  • donc, on libère la voie au camp du "oui", dans les pays qui ne se sont pas encore exprimés (Pays-Bas, Danemark, Pologne, Grande-Bretagne, etc.)

Et en se faisant la championne du referendum d'initiative populaire, la France se remettrait au centre de la construction européenne, tout en traçant la route pour une victoire du "oui" dans les pays qui ne se sont pas encore prononcés, en tout cas, en ôtant aux partisans du "non, dans ces pays, la totalité de leurs arguments…

Voilà ce que moi, j'aurais fait, pour faire avancer la cause de la construction d'une Europe des peuples et non des lobbies ou des oligarchies financières.

N'oublions pas que le vote français n'est qu'une étape ; du reste, nombreux sont les Européens qui sont venus prêter main forte au "oui" en France ; la question est de savoir maintenant quelle va être la contribution française à une victoire du "oui" dans les pays qui doivent encore se prononcer : combien d'élus et de personnalités françaises vont se déplacer en Grande-Bretagne, Pologne, Danemark et ailleurs, pour prêcher la bonne parole du "oui" ? Je ne parle pas du "non", dont on a vu qu'il n'était pas vraiment "européen".

Et, de ce point de vue, l'impulsion annoncée, l'autre jour, par Jacques Chirac, en matière de politique intérieure, devrait sonner, pour le reste de l'Europe, comme une mauvaise nouvelle : "Finalement, ces Français, ils ne se servent de l'Europe que comme prétexte à leurs tripatouillages internes !" risquent de penser les voisins européens.


(fin de l'extrait de mon "Petit Courrier" de mai 2005)


Et maintenant, chers amis internautes, vous voilà suffisamment armés pour apprécier le CARNET DE NOTES des présidentielles que je vous soumets ici..., en vous souhaitant une bonne lecture !



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